Si tu préfères la version audio de l’article, la voici :
https://www.quiaimeastuces.com/wp-content/uploads/2022/09/handicap-article-voixoff.mp3Un matin de novembre 1991, tout bascule…
Il y a quelques jours sur Instagram, j’ai ouvert une foire aux questions concernant mon handicap. Je reçois chaque semaine des petites questions à ce sujet alors je me suis dit que cela serait plus pratique de tout rassembler. Pour que mes réponses soient les plus complètes possible, j’ai finalement décidé de rédiger cet article. J’espère qu’il vous plaira et répondra à toutes vos questions. Je le vois aussi pour moi comme un exutoire. Ça me fait du bien de poser à l’écrit tout ce qu’il y a dans ma tête sur ça. Je vais répondre à vos questions le plus sincèrement possible, mais aussi avec humour, car c’est comme cela que je suis et que je procède depuis toujours. Si toutefois, il manque des réponses, n’hésitez pas à poser votre question en commentaire et je mettrai à jour l’article rapidement.
“Question bête, mais quel est ton handicap ?”
Tout d’abord, il n’y a pas de question bête.
Je suis née le 19 novembre 1991 avec un syndrome poly malformatif qui affecte (en gros) mon dos, ma jambe droite et certains de mes organes comme les reins (je n’en ai qu’un) ou encore les ovaires. En gros, et comme je le dis souvent, je suis un kit IKEA. Il manque des pièces ou il y en a en trop ahah. Depuis ma naissance, je suis passée par la case hôpital de très nombreuses fois (une trentaine d’opérations pour arriver là où j’en suis aujourd’hui).
“As-tu souvent des douleurs ?”
Lorsque je fais des efforts (efforts = marcher 1 ou 2 km pour moi), mais cela dépend de plein de facteurs. À l’heure où j’écris cet article, j’ai mal. Ma sciatique est bien présente et encore il n’y a pas que ça. Mais je sais que d’ici demain ça ira un peu mieux. Le pire, c’est le dos et le ventre, car ce sont des douleurs quotidiennes. Ma chance ? Bosser de chez moi pour aménager mes horaires en fonction de mes douleurs et ne pas avoir de déplacements.
“Pourquoi ne pas utiliser un fauteuil roulant pour les longues balades ?”
Ça m’arrive ! Lorsque je vais à Disney ou dans une grande ville par exemple. Mais il faut comprendre que ça me tient à cœur de marcher. J’ai appris à marcher à chaque nouvelle opération et je sais que je ne pourrai pas marcher toute ma vie (selon les médecins, même si là encore tout peut évoluer hein) donc tant que je le peux et que ça n’est pas extrême, je marche.
“As-tu pu penser plus jeune que ton handicap serait un frein en amour ?”
Il ne me semble pas, ou alors pas beaucoup. Bien sûr, j’ai déjà eu des moments pas super joyeux où j’ai pu douter, mais je connais des copines, valides, qui ont déjà dit “je ne trouverai jamais personne”. Alors je crois que c’est propre à chacun et que tout le monde passe par cette phase-là un jour ou l’autre, handicap ou pas. J’ai toujours eu la chance d’être super bien entourée (famille et amis) alors je savais que si mon handicap posait un problème à quelqu’un, cette personne ne me méritait pas. J’ai déjà eu, par exemple, un “ex” qui ne voulait pas me tenir la main en public. Bon, autant vous dire que ça n’a pas duré bien longtemps ahah. Ciaoooo!
“Si tu pouvais enlever ton handicap aujourd’hui, le ferais-tu ?
Ou resterais-tu comme tu es ?”
THE question. C’est drôle, nous en parlions il y a peu de temps avec mon chéri. Je ne sais pas vraiment pour être honnête. On pourrait croire que j’aurais répondu “OUI! OUI! OUI!”, mais ce n’est pas si simple. Mon handicap fait partie de moi, il a fait de moi celle que je suis aujourd’hui. Alors, enlever les douleurs, oui, mais mon handicap à proprement parler, je ne sais pas trop. Bon entre nous, quelques cm en plus seraient les bienvenus hein :).
“Ta maman connaissait ton handicap avant ta naissance ?”
Non. C’est là un sujet très compliqué car peu commun.
Le gynécologue de ma maman savait, mais lui a caché mon état pendant sa grossesse. Il a donc pris la décision de mentir (ce monsieur était contre l’lvg) pour ne pas laisser le choix à mes parents. C’est donc seulement à la naissance que mes parents (et le personnel soignant présent ce jour-là) ont découvert ce que j’avais. Un choc (et le mot est faible) pour tous puisque pendant sa grossesse on a dit à ma maman que j’étais en parfaite santé. Ce jour qui devait être un heureux événement s’est rapidement transformé en cauchemar. Ça a été très difficile pour mes parents, car certains membres du personnel soignant ont manqué de tact en annonçant que je n’avais qu’une jambe par exemple (je ne raconte pas tout) et ma maman ne l’a pas supporté. Mon papa a alors insisté pour que je sois présenté à ma maman qui avait vraiment besoin de me voir. Sa tension n’était pas bonne suite à cette annonce et il le fallait.
“As-tu parfois des big baisses de moral ? Comment te requinques-tu ?”
Oh, mais oui bien sûr que ça m’arrive ! Parfois plusieurs fois par jour, parfois pas du tout pendant un long moment. C’est finalement très aléatoire. Quand ça arrive, j’en veux à la terre entière, je ne comprends pas pourquoi moi (la grande question sans réponse lol), et je repense à tout ce que mon handicap m’a pris ou m’empêche de faire dans la vie. Dans ces moments-là oui, je voudrais être “normale” et enlever ce dernier. Et puis les pensées négatives laissent petit à petit place à d’autres plus joyeuses. Je repense à ce que je PEUX faire avec mon handicap, à tout ce que j’ai la chance de faire et d’avoir, je me suis dit qu’il y a BIEN pire, que ça ne sert pas à grand chose de penser à tout cela.
Alors attention hein, être triste/en colère, c’est normal, c’est humain, ça fait du bien de temps en temps de tout envoyer péter, de pleurer, de crier, de râler et je ne prône pas le “positivisme” à tout prix. Ça me gonfle moi aussi quand on me dit “sois positive” alors ce n’est pas moi qui donnerais ce type de discours. En revanche, ceux et celles qui me connaissent savent que je suis de nature souriante et je reste très peu dans cet état de tristesse. Je me remotive seule (une bonne série et ça repart) ou encore, grâce au soutien de mon chéri, de mes amis et de ma famille (même si je ne leur en parle pas tout le temps. Les pauvres sinon ahah).
“J’ai lu que ton handicap touche les ovaires.
Cela remet-il en cause une éventuelle grossesse ?”
Malheureusement, oui. Comme je le dis parfois par ici, c’est un sujet délicat à aborder pour moi. Bien sûr, lorsque je décide d’en parler comme ici, aujourd’hui, pas de souci. La plupart du temps (95 % du temps), je n’en parle pas car ça me fait penser à des choses difficiles. Je vis donc au jour le jour et je verrai où la vie me mène à ce sujet. Lorsqu’on me pose la question (en dehors de la FAQ), sans crier gare, “alors à quand le bébé ?”, “bientôt le bébé ?”, “vous allez avoir des bébés trop mignons vous”, forcément ça pique, fort.
Comme je le dis souvent, on ne sait pas s’il s’agit d’une maladie, d’un choix, d’une récente fausse couche, etc. On ne connaît pas la vie des gens, donc le mieux, dans la vie réelle ou sur les réseaux, reste de ne pas aborder ce sujet SAUF si ça vient de la personne concernée. Récemment, j’ai été extrêmement touchée par la délicate attention d’une amie. Elle sait ce que nous traversons et m’a dit “je te laisse me tenir au courant si tu le souhaites, je ne poserais pas de question, sauf si tu en parles”. Merci pour ça
“As-tu tout de suite prévenu ton chéri de ton handicap ?”
Pour vous remettre un peu dans le contexte, j’ai rencontré mon chéri sur Internet (Team Skyblog). Aussi, pour répondre à la question : ILLICO! Par respect pour lui et pour éviter de nous faire perdre du temps à tous les deux, j’ai souhaité lui en parler le plus rapidement possible. Alors, après avoir échangé 2-3 banalités, j’ai expliqué mon “petit” parcours de vie. La suite, on la connaît…
“Qu’est-ce qui est difficile à vivre pour toi au quotidien ?”
Les douleurs : et, de ce fait, tous les moments que cela me fait louper (les sorties, les restaurants avec les copains, etc).
La fatigue : ça va de paire avec les douleurs, mais c’est là où je sens que mon handicap est bien présent dans ma vie.
Ma petite taille : faire 1 mètre 40, parfois, ça me gonfle pour des trucs bien précis au quotidien.
Le fait de ne pas pouvoir tomber enceinte.
“As-tu encore des opérations dans les années à venir ?”
Malheureusement, oui. Comme je le disais sur Instagram, je ne connais pas le nombre d’opérations qu’il me reste, mais je sais qu’il faudra repasser par la case hôpital notamment pour mon dos et ma hanche droite (probablement ma jambe un jour aussi). Ça me fait tellement bizarre de repenser à ça, car je n’ai pas eu ce genre de grosse opération depuis si longtemps. Je sais ce que ça veut dire et ça me terrifie (hospitalisation, rééducation, douleurs…).
“À quel âge as-tu pris conscience de ton handicap ?”
J’ai longtemps réfléchi à cette question, mais je n’ai pas su trouver de réponse précise. Je le sais depuis toujours. Il fait partie de moi et de ma vie depuis mon premier souffle.
“Où as-tu eu tes opérations étant enfant ?”
Mes opérations ont eu lieu à l’hôpital pédiatrique Clocheville à Tours. Vous savez, malgré tout, j’en garde de très bons souvenirs (sauf les douleurs bien sûr). C’était ma deuxième famille. J’ai eu des liens très forts avec le personnel soignant, les infirmières, les aides soignantes et les dames du ménage. Quand on passe parfois des mois là-bas, c’est à eux qu’on se confit, c’est avec eux que l’on rit et que l’on pleure aussi.
“Et pour Romain ? Comment le vit-il ? (regard des autres, etc)”
Je laisse Romain (mon mari) répondre :
Je n’y prête plus attention, mais il arrive lorsqu’elle a mal, ça me ramène à la réalité et c’est dur de ne pas pouvoir l’aider. J’aimerais faire plus que ce que je fais… Pour les regards, je les vois de moins en moins, mais ce que je vois le plus ce sont les enfants. C’est juste de la curiosité innocente et ça nous fait sourire en général. Vivre avec Clem, c’est adapter mon quotidien à son handicap (ex: pour moi faire ceci, c’est simple, mais pour elle ça ne l’est pas et donc je l’aide pour ça, mais c’est normal, bien sûr) et rire tout le temps (ou presque).
“Des mots, des gestes à éviter, selon toi, envers une personne avec un handicap ?”
Je ne parle que pour moi hein, mais en général, je ne suis pas très à l’aise avec les regards de pitié (ou de compassion très très très très prononcés), le mot “courageuse” aussi, même petite, il m’agaçait ahah car ce n’est pas du courage selon moi, c’est ma vie, c’est comme ça et je n’ai pas vraiment le choix. Je comprends bien sûr ce que les gens veulent dire et ils essaient toujours de bien faire donc je ne vais pas leur reprocher, mais ça pique un peu. Bon après, les regards insistants ou les messes basses (en général, ce n’est d’ailleurs pas très discret et on entend tout…).
J’ai tellement d’anecdotes de remarques pas gentilles du tout ou de comportements déplacés que je pourrais en faire un article dédié, je crois ahah. Pour finir, infantiliser en imposant de l’aide ce n’est pas quelque chose qui passe très bien. Si j’ai besoin d’aide, je le demande, mais me prendre par le bras pour traverser la route (exemple nul) sans mon consentement, c’est un gros non.
“As-tu des soins au quotidien ?”
Pour l’instant, non.
Sauf un peu de kiné pour aider mon corps à ne pas perdre en mobilité car je suis très sédentaire.
“J’ai un petit garçon de 3 ans, comment lui expliquer quand il demande devant la personne ?”
Le plus simplement du monde
La curiosité des petits (et des plus grands) est quelque chose de normal et d’humain. Moi aussi, il m’arrive de regarder une personne en situation de handicap (discrètement bien sûr) et de me demander ce que cette dernière a. Le tout c’est de rester dans ce côté humain car bien souvent les personnes handicapées sont déshumanisées et mises de côté dans la société alors qu’elles sont comme tout le monde.
À cœur ouvert dans cet article. J’espère qu’il vous aura plu.
Merci pour votre lecture et votre soutien.
À très vite
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