En mai 2012, je recevais une invitation pour assister au lancement de la première marque de vernis à ongles écologiques, Kure Bazaar, dans le "Nails Bar Ecologique" du Bon Marché. N'ayant jamais été très fan de ce type de produits, je ne m'y étais pas rendue. En plus, très sceptique, je ne voyais pas comment un vernis à ongles (VAO) pouvait être écologique étant donné le nombre d'ingrédients synthétiques qu'il contient d'ordinaire. Je n'ai pas eu l'occasion d'en formuler pendant ma carrière de chimiste cosméticienne mais j'ai eu des cours sur le sujet, et autant que je me souvienne, ce sont des produits très très synthétiques ! Bref, un an après cette invitation, seuls les imbéciles ne changeant pas d'avis, à force d'entendre parler de cette marque, je me suis intéressée à la question et prêtée au jeu du test ! Et voilà que je me peinturlure les ongles des mains avec une teinte corail de la collection summer, qui est la plus flashy de la gamme "Le corail, c'est chic" (cf ci-dessous, celle à l’extrême gauche), depuis maintenant trois semaines ! Oui oui, tout ça !
Comme dans le premier épisode de la série #j'ai testé, j'vous raconte !, consacré à la crème sorbet de Caudalie, je vais donc vous faire part de cette découverte aussi surprenante que plaisante, et qui fait un sacré effet autour de moi ! ;)
Gamme "Le Corail, c'est chic" © Kure Bazaar
Nom de code : Kur Bazaar, teinte Coquette
On aime...
...côté texture
Une application facile et c'est tant mieux car déjà que je ne suis pas fan de ce type de produit, si en plus, il faut galérer, non merci ! Mais je vais argumenter de ce pas. J'ai apprécié sa viscosité et son filant (le produit est ni trop liquide, ni trop épais, du coup, on ne s'en met pas partout), le glissant (il s'étale bien sans faire de paquet) et l'homogénéité du film à l'application. Enfin tout cela, si on s'y prend bien, car pas la peine de vous préciser que l'application sur les premiers doigts ont été un véritable carnage, ça débordait de partout, les cuticules étaient toutes oranges elles-aussi...Il a donc, bien-sûr, fallu que je m'y reprenne à plusieurs fois, novice oblige ! C'est tout un métier la pause de vernis à ongles ! Il faut rester bien concentrée sur ses doigts et ne pas répondre à son tel qui sonne à côté, sinon c'est foutu ! Donc au bout de la deuxième ou troisième tentative, bon ok, j'avoue troisième, tous mes doigts étaient bien peinturlurés et de façon homogène ! La preuve en image !
Honnêtement, pour une débutante de mon espèce, j'ai trouvé que le produit s'étalait facilement. Comble de la surprise, il a séché plutôt rapidement. Par "plutôt rapidement", j'entends, pas besoin de poireauter dix plombes sans rien faire pour risquer de ruiner l'oeuvre d'art que je venais de réaliser sur mes petits doigts ! Parce que soyons sérieuses deux secondes, ça prend du temps quand même l'atelier VAO donc il faut quand même se libérer un petit créneau pour faire une pause sans faille. Là, je n'ai pas vu le temps passé que c'était déjà sec et alors maintenant après plusieurs séances, je suis au top, je peux même pianoter sur mon clavier pendant qu'il sèche ! Donc au final, j'étais très fière du résultat et le rendu était très plaisant. Avec une teinte aussi flashy, il n'est pas passé inaperçu dans mon entourage et a fait beaucoup d'envieuses, même les garçons l'ont trouvé "très joli" pour reprendre très exactement leur dire ! Oui oui oui !
...côté odeur
Fidèle à un vernis à ongles lambda, l'odeur ne passe pas inaperçue, elle reste forte, on sent bien la présence des solvants comme dans un VAO traditionnel. J'aurai pourtant parié que c'est à ce moment précis que l'écologie allait intervenir. Et bien non, loupé !
...côté ingrédients
Ahhh, c'est là que l'écologie intervient alors, me dis-je. Je suis donc aller investiguer un peu sur les ingrédients. Sauf qu'il n'y a pas de liste INCI sur le produit. J'ai donc épluché les documents envoyés par la marque. Tous les 44 VAO de la gamme sont annoncés écologiques et non biologiques, attention ne pas confondre. D'ailleurs faisons une petit digression à ce sujet.
Les vernis à ongles comptent parmi les catégories de produits cosmétiques difficiles à convertir en naturel/bio. Pourquoi ? Car ils sont constitués à la base d'un grand nombre d'ingrédients synthétiques dont on ne trouve pas aisément une version naturelle équivalente, aussi efficace en termes de tenue, brillance et d'application. Il existe cependant des VAO bio sur le marché mais je n'ai pas encore testé !
Kure Bazaar présente sa gamme de 44 produits comme étant "une première mondiale" avec une "formule allégée en chimie jusqu'à 85 % selon les couleurs". J'en profite pour rappeler que la chimie est partout sur terre, même dans ce qui est naturel, évitons donc de faire l'amalgame, le terme synthétique serait donc ici plus approprié.
Les formules sont présentées avec une composition à 85 % d'origine naturelle végétale*, à base de pulpe de bois, coton, pomme de terre, maïs et blé. L'astérisque renvoie à l'information suivante : Natural Solvents Certifided 85 % (solvants d'origine naturelle).
La marque revendique également l'absence des 4 ou "4 free" pour reprendre la terminologie américaine, dont je vais vous détailler le fruit de mes recherches :
> Toluene : un solvant qui aide à la dilution des différents ingrédients contenu dans le produit et rend la matière du vernis stable, on lui reproche son caractère neurotoxique, il serait responsable d’allergies cutanées et respiratoires,
ingrédient irritant dont les émanations toxiques peuvent endommager le système nerveux central et le cerveau
ingrédient irritant dont les émanations toxiques peuvent endommager le système nerveux central et le cerveau
ingrédient irritant dont les émanations toxiques peuvent endommager le système nerveux central et le cerveau
us de> Formaldehyde : un autre solvant qui permet de durcir l'ongle mais répertorié depuis 2004 comme « produit cancérigène » par le Centre International de Recherche sur le Cancer,
> DBP ou dibutyl phthalate : un plastifiant qui facilite l'étalement du vernis sur l'ongle et qui compte parmi les perturbateurs endocriniens. Son utilisation dans les cosmétiques en Europe est d’ailleurs interdite depuis près de 40 ans,
> Camphre Synthétique : un autre plastifiant qui peut causer des allergies.
(perturbateur endocrinien)(perturbateur endocrinien)
(perturbateur endocrinien)Le verdict est clair, ces 4 composants couramment utilisés dans les VAO classiques sont profondément décriés (notamment aux États-Unis) car jugés toxiques pour la santé humaine. J'ajouterais également qu'ils sont mauvais pour l'environnement car polluants.
Décodons la liste des ingrédients trouvée sur le site de Mademoiselle Bio :
Liste INCI : BUTYL ACETATE - ETHYL ACETATE - NITROCELLULOSE - ISOSORBIDE DICAPRYLATE - ADIPIC ACID/NEOPENTYL GLYCOL/TRIMELLITIC ANHYDRIDE COPOLYMER - ALCOHOL - STEARALKONIUM BENTONITE - STYRENE /ACRYLATES COPOLYMER - SILICA - DIACETONE ALCOHOL - BENZOPHENONE-1 - TRIMETHYLPENTANEDIYL DIBENZOATE - PHOSPHORIC ACID - ALUMINA - TIN OXIDE - may contain +/-: MICA - CI 77000 - CI 19140 - CI 77891 - CI 75470 - CI 77491 - CI 77492 - CI 77499 - CI 15850 - CI 15850 - CI 77742 - CI 12085 - CI 77266 - CI 77510 - CI 15880
> BUTYL ACETATE & ETHYL ACETATE : deux solvants qui constituent la base du VAO et lui donnent son odeur caractéristique, ils permettent de diluer tous les autres constituants pour obtenir un mélange homogène,
> NITROCELLULOSE : un ingrédient obtenu à partir d'un produit naturel, la cellulose, qui peut provenir du coton ou du bois. C'est un agent filmogène, signifiant qu'il va laisser un film continu sur l'ongle. Il donne au vernis sa résistance mécanique et chimique. C'est aussi un agent de suspension, c'est à dire qu'il permet aux pigments (couleur du vernis) de tenir en suspension. On notera tout de même que la nitrocellulose est très explosive, elle a été utilisée dans le passé comme explosif (la célèbre Poudre B), j'dis ça, j'dis rien ;)
> ISOSORBIDE DICAPRYLATE : un plastifiant qui va donner de l'élasticité au film de nitrocellulose pour qu'il soit flexible et qu'il ne casse pas,
> TRIMETHYLPENTANEDIYL DIBENZOATE : un autre plastifiant qui, de la même façon, adoucit et rend souple le film de nitrocellulose,
> ADIPIC ACID/NEOPENTYL GLYCOL/TRIMELLITIC ANHYDRIDE COPOLYMER & STYRENE /ACRYLATES COPOLYMER : deux résines qui vont apporter de la consistance au film de nitrocellulose et permettre son adhérence sur l'ongle, elles apportent également de la brillance,
> ALCOHOL & DIACETONE ALCOHOL : deux solvants pour diluer le mélange, d'origine naturelle, on peut les obtenir à partir du maïs, du blé, de la pomme de terre, de la betterave, entre autres,
> STEARALKONIUM BENTONITE : un dérivé d'argile, c'est un agent (thixotropant, pour son nom savant) qui va diminuer la viscosité du produit quand on l'agite, le rendant ainsi plus fluide et facile à étaler,
> BENZOPHENONE-1 : un ingrédient qui "assèche" le mélange et garantit ainsi un séchage rapide,
> PHOSPHORIC ACID : un agent régulateur de pH qui va stabiliser le produit et les pigments,
> ALUMINA & SILICA : deux agents opacifiants et anti-agglomérants qui permettent aux pigments de ne pas s'agglomérer entre eux, ils apportent également de la viscosité au vernis,
> TIN OXIDE : un agent opacifiant qui viscose le VAO,
> PIGMENTS : tous les autres ingrédients qui suivent le may contain sont des pigments qui, ensemble, vont donner la couleur du vernis. Il est souvent écrit sur les packaging "may contain" afin de citer l'ensemble des pigments utilisés dans la gamme de vernis et d'éviter de devoir faire des listes INCI spécifiques pour chaque produit.
Remarque : Les solvants sont la base du vernis à ongles, ils permettent de mélanger les autres constituants et de les diluer, leur effet est déterminant sur le temps de dépôt et d'évaporation du produit fini.
Donc en effet, la marque s'est attaquée aux ingrédients réputés comme les plus toxiques pour la santé humaine en les supprimant. Nous avons identifié les constituants annoncés "d'origine naturelle et à base de pulpe de bois, coton, pomme de terre, maïs et blé" : les alcools et la nitrocellulose.
Pour en savoir plus sur les dessous des VAO tradi, "Sous les vernis à ongles, les toxiques ", un reportage sur la toxicité de ces derniers, sur la chaîne suisse RTS, datant de juin 2012.
« Sous le vernis à ongles, les toxiques ! » un reportage édifiant sur la toxicité du vernis à ongles a été présenté en juin 2012 sur la chaine suisse RTS avec des analyses au laboratoire à l’appui.
« Sous le vernis à ongles, les toxiques ! » un reportage édifiant sur la toxicité du vernis à ongles a été présenté en juin 2012 sur la chaine suisse RTS avec des analyses au laboratoire à l’appui.
...côté packaging
Un flacon en verre de 10 ml, sobre, simple, qualitatif, chic, avec une forme trendy. Pas d'emballage secondaire, ça c'est bien ! Mais la présence d'un deuxième bouchon (en plus de celui qui sert de pinceau) pour l’étanchéité du flacon et optimiser la conservation du produit afin qu'il ne sèche dans son flacon, principale problématique des VAO.
...côté marque
On aime naturellement l'engagement écologique de Kure Bazaar tant sur la composition que sur l'absence de packaging secondaire. Mais peu d'informations sont présentes sur le site de la marque, mise à part la philosophie. On regrette que la composition des VAO n'y soient pas indiquées et détaillées.
Verdict : ce produit est plutôt topissime puisqu'il m'a convaincu, moi qui suis loin d'être une addict des VAO !Une belle intention écolo de la part de la marque. Petit bémol pour le double bouchon. Une jolie gamme avec beaucoup de choix de teintes. On regrette le manque d'info sur le site. Leur prix peut être considéré comme onéreux, 16 euros, par rapport aux VAO classiques, mais j'ai envie de dire la santé et l'environnement ont un prix inestimable, non ?
Sources de l'article
Cornelia Dum, Coccinelle de la beauté
Zeinelle